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Osons rigueur technique et passion humaine

Avertissement

Ce récit est une œuvre de fiction. Toute ressemblance avec des situations réelles ou avec des personnes existantes ou ayant existé, ne saurait être que coïncidence fortuite.


Chapitre 1. Une idée qui prend racine

Courant de l’année 2014 – Bureau d’Abdennacer, ENSP, Hassi Messaoud

Abdennacer se tenait devant la grande baie vitrée de son bureau, observant l’immensité du désert qui s’étendait à perte de vue. Le soleil déclinant projetait des ombres longues et sinueuses sur le sable, mais son esprit était loin de ce paysage familier. Il était ailleurs, concentré sur une idée qui prenait forme depuis des semaines, une idée qui pouvait changer la donne pour SONATRACH, la compagnie mère pour laquelle ENSP offrait ses services. Il réfléchissait à un problème qu’il voyait chaque jour sur les chantiers de forage : l’usure des outils. Ces derniers coûtaient cher à remplacer, et l’efficacité des opérations en souffrait.

L’usure des outils de forage était un problème récurrent. Les coûts montaient en flèche à chaque remplacement, surtout en cette période d’incertitude économique où chaque dollar comptait. C’est là que l’idée avait germé : Et si, au lieu de remplacer systématiquement les outils usés, on les recyclait, les modifiait pour les améliorer et les optimiser pour les rendre non seulement fonctionnels mais aussi performants que des outils neufs ?

Il pianota quelques lignes sur son ordinateur portable avant de composer le numéro de Abdelkader, un vieil ami et collègue qui avait toujours été un génie de la mécanique et de l’ingénierie des fluides. Il savait que s’il y a quelqu’un qui pourrait l’aider à concrétiser cette vision, c’est bien lui.

Abdelkader n’était plus dans les opérations forages mais il avait gardé un esprit vif et une expérience que peu pouvaient égaler. Il avait quitté son poste de directeur des opérations à SONATRACH pour entamer une thèse de doctorat en science de l’information à l’Université d’Aix-Marseille. Et ça tombe à point nommé, il s’était spécialisé dans le management de l’innovation et l’information brevet.

— Allô, Abdelkader ?

— Oui, c’est moi. Abdennacer ! Quelle bonne surprise, comment ça va ? répondit la voix de son ami à l’autre bout du fil.

Ils échangèrent quelques amabilités et confidences d’ordre privés et Abdennacer engagea le sujet qui le taraudait depuis des mois.

— Ecoute, je t’appelle sur un sujet très important.  Une idée qui pourrait révolutionner nos opérations de forage. Je pense que ça va t’intéresser…

— Dis-moi tout, dit Abdelkader, la curiosité marquant son ton.

Abdennacer sourit, prêt à lancer son projet.

— Imagine que chaque outil de forage usé puisse être transformé, non seulement remis en état mais modifié pour être aussi performant qu’un outil neuf sinon plus. J’ai réfléchi à un design qui permettrait d’optimiser les angles d’attaque et d’améliorer la circulation des boues. Il suffirait de quelques ajustements techniques.

Abdelkader, intrigué, prit quelques secondes avant de répondre.

— Tu veux qu’on se lance dans une sorte d’ingénierie inversée avec en plus des ajustements basés sur des brevets existants ?

— Exactement. Utiliser les brevets existants pour tirer le meilleur des innovations actuelles, tirer parti de la CAO pour améliorer la géométrie de l’outil, optimiser le taux de pénétration (ROP) et ajuster les buses pour faciliter la circulation des boues de forage. Cela pourrait réduire les coûts pour l’ENSP, de 30 et 40 % par rapport à l’acquisition de nouveaux outils et économiser pour SONATRACH jusqu’à trois jours de forage, soit près de 3 millions de dollars. On peut vraiment optimiser la phase de forage en 12 pouces 1/4, où les gains en performance sont les plus marquants.

— L’idée est intéressante, dit Abdelkader.

— Ça pourrait vraiment changer les choses pour SONATRACH et ENSP, enchaina Abdennacer. On a cumulé un stock colossal de trépans usés et les espaces d’entreposage viennent à manquer. L’idée en gros, c’est recycler au lieu d’acheter, réparer au lieu de remplacer. Qu’en dis-tu ?

Abdelkader sourit à l’idée, sachant déjà où Abdennacer voulait en venir.

— Ça semble ambitieux, mais réalisable. Je crois qu’on tient quelque chose de grandiose. Mais il nous faudrait analyser les brevets existants, tirer parti des meilleures innovations déjà sur le marché et les combiner avec quelques modifications. On se voit la semaine prochaine pour planifier tout ça ?

— Ça marche. On se voit la semaine prochaine et on met tout ça en place. À bientôt, Abdelkader.


Chapitre 2. L’appel de l’innovation

Une semaine plus tard – Bureau d’Abdelkader, Marseille

Abdennacer ajusta ses lunettes et se connecta à la vidéoconférence. Sur l’écran, Abdelkader apparaissait, l’air concentré. À ses côtés, un autre visage familier, Luc, son directeur de thèse. Luc, un expert en brevets et innovation frugale, avait accepté de les conseiller sur ce projet.

L’idée était simple mais audacieuse : analyser les brevets existants, utiliser la Conception Assistée par Ordinateur (CAO) et appliquer des techniques de reverse engineering pour repenser un outil de forage usé.

— Alors, qu’avons-nous aujourd’hui ? lança Luc, sourire en coin.

Abdelkader prit la parole :

— Abdennacer a une idée brillante. Il veut recycler des outils de forage usés en les modifiant pour améliorer leur performance. Le but est de maximiser le ROP tout en réduisant les risques de venue de gaz, en somme, de blowout grâce à une meilleure circulation des boues.

Luc hocha la tête, pensif.

— Je vois. Une innovation frugale, c’est intéressant. Comment comptez-vous concrétiser cette idée ? demanda Luc, son regard analytique fixé sur les écrans.

Abdelkader répondit avec assurance :

— J’ai identifié plusieurs brevets qui couvrent les innovations sur les angles d’attaque et la circulation des fluides. Nous pouvons privilégier que des brevets tombés dans le domaine public.

— Je crains qu’ils soient obsolètes ! rétorqua Abdennacer.

—  Pas vraiment, répondit Abdelkader avec assurance. On n’est pas sur des brevets d’électronique ou de la téléphonie mobile où les brevets sont vite dépassés ! D’après l’analyse que j’ai réalisée sur les quelques 7000 brevets que j’ai recensés, plus des deux tiers sont viables. Et je vais t’étonner encore plus, la moitié de ces brevets sont libres. Tu confirmes Luc ?

—  Absolument ! repris Luc. Et de toutes façons, s’il y a un brevet qui nous intéresse particulièrement, on pourrait toujours négocier son utilisation pour pas cher. D’ailleurs, il faut établir une shortlist des détenteurs de portefeuilles brevets. Elle pourrait servir pour d’éventuelles collaborations ou partenariats.

—  Cerise sur le gâteau, surenchérit Abdelkader. Pour notre problématique d’ajustement des buses pour une meilleure gestion des pressions de formation par circulation de la boue, j’ai repéré une pépite que nous pouvons utiliser en toute légalité sans paiement de royalties. Un brevet qui a expiré avant échéance pour non-paiement des annuités. Merci qui ?

Abdennacer répondit sourire aux lèvres :

—  Merci Abdelkader !

Abdelkader le reprit aussitôt :

—  Tu devrais dire Merci Dresser Industries qui a abandonné la fabrication des trépans depuis son acquisition par GE en 2011, pour se concentrer sur des produits et services du contrôle des flux. Ce brevet a été tout simplement zappé par GE lors de la reprise des actifs.

— Wow ! Tu es un génie ! S’exclama Abdennacer. Si l’on réussit notre coup, on pourrait obtenir un accroissement de 20 % du ROP et économiser au moins 200.000 dollars sur chaque phase 12 pouces 1/4 pour l’ENSP, c’est quand même 40% du prix d’un trépan neuf. Le reverse engineering va nous permettre d’analyser les faiblesses des outils usés et de les rectifier pour les rendre plus performants.

Luc hocha la tête, absorbant les détails.

— Vous allez devoir faire attention aux brevets existants, mais il y a certainement moyen d’innover en utilisant ce qui est déjà publié. Je vous aiderai à naviguer dans tout ça.

Abdennacer prit le relais :

— Je suis convaincu que l’ingénierie inverse peut nous permettre de repenser ces outils usés et leur redonner une nouvelle vie. Si on optimise les angles d’attaque et la gestion de la circulation des fluides, on peut faire une vraie différence dans les performances. On va aussi utiliser la CAO pour modéliser ces ajustements. Une fois le design validé, Mohsin pourra s’occuper de la rectification dans les ateliers ENSP avec les machines CNC.

— Exactement, acquiesça Luc. Ce qu’on peut faire, c’est d’abord identifier les brevets les plus proches de ce que vous voulez accomplir. Ensuite, vous pourrez concevoir des améliorations sans empiéter sur les brevets existants.

— Ça me va, répondit Abdennacer. Allons-y alors. On se met au travail dès demain.


Chapitre 3. Le génie dans les détails

Un mois plus tard – ENSP, Hassi Messaoud

Dans les semaines qui suivirent, Abdelkader et Abdennacer se plongèrent dans l’étude des brevets. Leur consultant de l’ombre, Luc, directeur de thèse de Abdelkader et expert en brevets, les guidait à distance depuis Marseille via de fructueuses vidéoconférences.

Abdelkader s’affairait à recueillir les données sur l’ancien trépan utilisé pour les phases 12 pouce ¼ sur différents puits de SONATRACH afin d’enrichir leurs réflexions. Il utilisait un logiciel open source de numérisation 3D par triangulation afin d’obtenir un nuage dense de points représentants les reliefs complexes du trépan.

Abdennacer esquissait les premières versions numériques du trépan numérisé sur DROPS, un logiciel de CAO dédié aux trépans et développé par Lyng Drilling, une petite société d’ingénierie qui a fini par être absorbée par le groupe Schlumberger.  A chaque modification de la géométrie des angles d’attaque, il lançait le simulateur de forage intégré à DROPS pour évaluer les performances potentielles de son nouveau design.

Abdelkader suivait avec intérêt les manipulations dextres de son compère. Il lui fit rappeler :

— N’oublie pas d’apporter les modifications aux buses selon les spécifications techniques décrites dans le document de brevet US6227316B1. J’en ai téléchargé sa version PDF.

— Tu as bien fait de me le rappeler, rétorqua Abdennacer. Je le fais de suite. Et hop !

Il rajouta :

— J’ai bientôt fini l’esquisse finale. Je lance une dernière simulation dans des conditions extrêmes pour la phase 12 pouces ¼ sur la distance en profondeur de 867 à 2530 mètres : une pression annulaire de l’ordre de 1900 psi et une pression en tête à 2000 psi, une densité de boue de 1,55 Kilogrammes par litre et bien sûr, un avancement de 1,4 mètres par heure, 22 % de plus que le ROP du puit similaire MGM#4. Allez mon kiki !

Abdelkader renchérit :

— Tu n’as pas choisi un puits tranquille. Ce trou nous a donné des sueurs froides. Allez ! On croise les doigts !

— Yes ! cria Abdennacer. Test concluant avec une performance de 22 %. On fige le design.

— Adjugé ! cria Abdelkader à son tour.

Dans l’atelier CNC d’ENSP, le bruit de la fraiseuse résonnait. Mohsin, le technicien expert en machines à commandes numériques, observait attentivement l’écran de sa machine. Il a programmé sa machine à commande numérique avec les données exactes de la géométrie et excavations que Abdennacer lui avait transmis. Devant lui, le bloc métallique usé attendait de se transformer en une pièce parfaitement calibrée.

— Tu es sûr de ton coup, Abdennacer ? demanda Mohsin, souriant sous sa barbe.

— Sûr et certain, répondit Abdennacer en posant une main sur l’épaule de Mohsin. On a passé des heures à ajuster les plans. L’outil est calibré pour une phase de forage en 12 pouces 1/4. Les angles d’attaque ont été revus pour réduire l’usure et améliorer la pénétration dans des formations argileuses dures, expliqua Abdennacer, qui supervisait les opérations d’usinage.

Mohsin hocha la tête, lançant la machine.

— Bon, si tu le dis. C’est parti.

Le métal grinça sous l’action de la fraiseuse, taillant minutieusement les nouvelles formes. Abdennacer et Mohsin observaient le processus avec fascination.

— Si ça fonctionne comme prévu, cet outil va faire des merveilles, dit Abdennacer.

— Il n’y a aucune raison que ça ne marche pas, répondit Mohsin en souriant.

— Mohsin, assure-toi que la géométrie des buses correspond bien aux spécifications du modèle, lança Abdennacer lors d’une dernière vérification avant d’envoyer l’outil sur son premier test. Les buses permettront une meilleure circulation des boues, ce qui va stabiliser la pression et éviter les éventuelles venues.

Mohsin, concentré sur la machine, hocha la tête par l’affirmatif en disant :

— J’ai tout pris en considération dans le paramétrage de la CNC.

Avec l’aide de Mohsin, le prototype de l’outil fut enfin fabriqué. Le métal, usé par des années d’opérations difficiles, retrouva un nouvel éclat et une nouvelle vie sous la coupe précise des CNC. Des ajustements millimétriques furent effectués pour s’assurer que chaque angle, chaque canal de circulation des boues, était exactement conforme au design imaginé par Abdelkader et Abdennacer.


👉 Pour comprendre le forage des puits de forage pétrolier


Chapitre 4. L’heure de vérité est réglée sur ONI23

Quelques semaines plus tard – Chantier de forage ONI23 – Phase de forage 12’’ 1/4

C’est le grand jour, Abdennacer arriva sur la plateforme de forage du puits baptisé ONI23. Il trouva le chantier en en pleine effervescence. Le bruit des machines se mêlait aux cris des hommes. Farid, le superviseur de forage, se tenait au centre de l’action, coordonnant les opérations tandis que l’équipe s’affairait autour de la plateforme. Le jour tant attendu était arrivé. Le moment était venu de tester l’outil modifié sur la phase de forage 12 pouces 1/4, une étape cruciale pour évaluer sa véritable performance.

— Alors Abdennacer, tu es confiant ? demanda Farid avec un sourire en coin, tout en ajustant son casque.

— Je le suis. Cet outil a été conçu pour exceller dans cette phase. 12 pouces 1/4, c’est là qu’il va faire la différence, répondit Abdennacer, les bras croisés, scrutant la plateforme avec attention.

— Tu es sûr que ce machin va marcher ? lança Djamel, un brin sceptique, en fixant l’outil flambant neuf qui trônait devant lui.

— On le saura bientôt, répondit Omar, le data engineer, les yeux rivés sur les capteurs de boue et les indicateurs de ROP.

Le vrombissement de la plateforme résonna à travers le désert alors que l’outil modifié commençait à mordre la terre, s’enfonçant dans la roche à une vitesse qui impressionna rapidement toute l’équipe. Les minutes passèrent, et l’équipe restait concentrée.

— Les pressions sont stables, la circulation des boues est bonne, annonça Djamel en jetant un œil aux jauges.

Amel, la géologue, observait les premiers échantillons de roche remontant à la surface, scrutant chaque changement dans la composition du sol pour anticiper d’éventuelles difficultés.

— Rien d’anormal pour l’instant. La formation est stable.

Soudain, Omar leva les yeux de son écran, une lueur de satisfaction dans le regard.

— Regardez ça. Le ROP vient de monter de 20 % par rapport aux derniers tests.

Farid hocha la tête avec un sourire satisfait.

— Si tout continue comme ça, on aura redéfini les standards du forage ici.

Les heures passèrent, et les résultats dépassèrent toutes les attentes. Le ROP était nettement amélioré, et les performances de l’outil modifié se révélaient bien supérieures à celles de l’outil d’origine lors du premier forage sur MDZ592. Mais ce n’était que le début de leur aventure.

De retour au bureau, Abdennacer, appela Abdelkader afin d’analyser les données du premier test.

— On l’a fait, annonça Abdennacer, un sourire de satisfaction éclairant son visage.

— Parfait ! Les résultats sont prometteurs, répondit Abdelkader, mais il y a encore des ajustements à faire. La circulation des boues peut être optimisée.

—  Je suis tout à fait d’accord avec toi, enchaina Abdennacer, faisons les modifications nécessaires et testons à nouveau sur le puits OMG602.


Chapitre 5. Le moment de doute à OMG602

Quelques semaines plus tard – Chantier de forage OMG602 – Phase de forage 12’’ 1/4

Le succès du premier test sur ONI23 donna un nouvel élan au projet. Après quelques ajustements mineurs, l’outil modifié était prêt pour un nouveau test sur le puits OMG602, une région plus difficile, allait être la véritable épreuve pour le trépan modifié. La phase de forage de 12 pouces 1/4 présentait des défis imprévisibles, notamment, des conditions géologiques plus difficiles avec une formation argileuse plus dure et des salifères qui peuvent contaminer les nappes phréatiques si les opérations du forage et de cémentation sont mal exécutées.

— Ici, rien n’est jamais simple, lança Farid en observant la plateforme. Si on évite de briser les couches salifères, ce sera déjà une victoire.

— Si l’outil survit à ce puits, il pourra survivre à n’importe quoi, plaisanta Messaoud en s’essuyant le front.

Farid ordonna le début du forage, et encore une fois, l’outil modifié se montra à la hauteur des attentes, malgré les conditions difficiles.

— La circulation des boues est beaucoup plus fluide. Aucune augmentation indésirable de pression, dit Omar s’adressant à Farid.

— Parfait, continuons ainsi, répondit Farid confiant.

— On doit rester vigilants, dit Abdelkader en observant les données de boue sur l’écran. La pression est instable dans cette région surtout dans les couches salifères. N’oublions pas que les grès de cette région peuvent contenir du gaz.

Soudain, Omar fronça les sourcils.

— La pression monte. Stoppez tout!

— Stop! cria Farid.

Le silence retomba sur le chantier tandis que l’équipe analysait la situation.

— Tout est sous contrôle, dit Djamil après quelques minutes. L’outil a bien géré la pression.


Chapitre 6. L’épreuve ultime à BRNP1

Quelques semaines plus tard – Chantier de forage BRNP1 – Phase de forage 12’’ 1/4

Le puits BRNP1, situé dans une région plus reculée et connue pour ses conditions extrêmes, était le plus redouté. Les formations Trias Argilo-Gréseux-Salifère (TAGS) composées de grès et de dépôts salifères, y étaient imprévisibles. C’était là que l’outil modifié allait être mis à l’épreuve ultime.

Abdennacer et Abdelkader étaient sur place cette fois-ci. Ils ne pouvaient pas se permettre de rater ce test.

— Alors, tu penses que l’outil tiendra ? demanda Abdennacer, observant l’horizon désertique, un vent chargé de sable soufflant doucement.

Abdelkader acquiesça, concentré sur les plans et les ajustements effectués après le dernier test.

— On a tout recalibré pour ce type de formation. Les buses devraient permettre une circulation optimale des boues, et les angles sont parfaits pour cette roche dure. Mais ici, tout est imprévisible. On doit rester vigilants.

Farid s’approcha, le visage soucieux.

— On a des retours d’expérience d’autres équipes qui ont foré dans cette région. Ils ont rencontré dans les couches gréseuses, des poches de gaz imprévues, donc on doit surveiller ça de près.

— Pas de souci, on a des capteurs à chaque étape, répondit Omar, assis devant l’écran de surveillance des paramètres. On capte la moindre variation dans la pression de fond.

Djamil, le mud logger, acquiesça tout en analysant les premières données.

— La circulation des boues est fluide pour l’instant, mais il faut surveiller la densité. Si la pression de la formation augmente, on risque d’avoir un afflux non contrôlé.

Amel arriva avec un échantillon de roche, son regard analytique en disait long.

— Formation plus dense que prévu, mais stable. On continue ?

Abdelkader hocha la tête. — Oui, on avance. Restez attentifs.

Les heures suivantes furent un véritable test pour l’outil. Messaoud, au sommet de la plateforme, faisait de son mieux pour maintenir le contrôle du trépan, mais les conditions devenaient de plus en plus difficiles. Soudain, Omar fronça les sourcils en fixant l’écran.

— Attendez… la pression dans la colonne de boue augmente rapidement. On a un problème !

— C’est une venue potentielle, s’écria Djamil. Fermez les vannes !

Farid réagit immédiatement, donnant l’ordre d’arrêter le forage et de fermer les systèmes de contrôle du puits. Un silence tendu s’installa alors que tout le monde retenait son souffle.

— C’est sous contrôle ? demanda Abdennacer d’une voix rauque.

— Oui, répondit Abdelkader après quelques minutes interminables. L’outil a fait son boulot. Les buses ont évité l’accumulation de pression, et la circulation est revenue à la normale.

— C’était moins une, souffla Messaoud depuis la plateforme. Cet outil est un vrai sauveur.

— Et ce n’est pas fini, ajouta Farid avec un sourire. On pourrait même faire mieux la prochaine fois.


Chapitre 7. L’annonce d’une (r)évolution

Quelques jours plus tard – ENSP, Hassi Messaoud

De retour au bureau, Abdelkader et Abdennacer s’assirent pour compiler les résultats. Les tests sur les trois puits avaient donné des résultats clairs : l’outil modifié avait amélioré les performances sur chaque chantier, notamment en termes de ROP, et avait permis d’éviter plusieurs incidents majeurs grâce à une meilleure gestion des pressions. Les résultats des tests sur les puits ONI23, OMG602, et BRNP1. Les données de la phase 12 pouces 1/4 étaient particulièrement impressionnantes.

— Regarde ça, dit Abdelkader en pointant les courbes sur son écran. L’outil a maintenu un ROP stable même dans les pires conditions sur BRNP1. C’est vraiment impressionnant.

— On parle de 411 000 dollars économisés pour l’ENSP sur l’ensemble des tests et 9 millions de dollars économisés pour SONATRACH avec les trois jours gagnés, dit Abdelkader en entrant les chiffres dans le rapport technique.

Abdennacer, appuyé contre la fenêtre, sourit.

— On a fait un travail de dingue. Maintenant, il faut partager ça avec le monde entier.

— On va proposer ça à une revue spécialisée dans l’innovation frugale, annonça Abdennacer. Ce projet mérite d’être connu.

Abdennacer hocha la tête, satisfait.

— Ce rapport va marquer un tournant dans l’industrie du forage. Nous avons prouvé que l’innovation frugale peut rapporter gros et transformer notre manière d’aborder les opérations de forage, conclut Abdelkader.

Ils passèrent les jours suivants à élaborer le rapport technique détaillant chaque phase du projet : les ajustements de l’outil, les tests effectués, et les résultats obtenus. Ils rédigèrent chaque ligne du rapport technique avec soin, détaillant les modifications apportées à l’outil, les tests effectués, et les performances observées. Le rapport serait une mine d’informations pour l’avenir des opérations de forage.


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Chapitre 8. L’accomplissement

Quelques mois plus tard – Bureau d’Abdelkader, Marseille

Quelques mois plus tard, la revue scientifique spécialisée dans l’innovation frugale publia les résultats de leur projet. L’article coécrit par Abdelkader, Abdennacer et Luc fit rapidement des vagues dans le monde de l’ingénierie pétrolière.

— On est publié sans aucune réserve, dit Abdelkader en feuilletant la revue. Les résultats sont bien accueillis par la communauté scientifique et industrielle.

— Et avec des résultats comme les nôtres – 40 % de réduction des coûts et des économies massives pour SONATRACH – ça ne passera pas inaperçu. Nous avons reçu des retours positifs de plusieurs experts. C’est un grand pas en avant pour nous, répondit Abdennacer via vidéoconférence.

La publication de leur rapport dans cette revue scientifique spécialisée était un véritable accomplissement. Ils avaient réussi à montrer comment une idée simple, appuyée par l’innovation et les brevets, pouvait transformer les opérations de forage.

Abdelkader feuilletait la revue avec une certaine fierté. Les résultats de leur projet étaient désormais à la portée de la communauté scientifique et des ingénieurs du monde entier.

— C’est fou de se dire que tout a commencé avec une idée de recyclage, dit-il en souriant.

— Et regarde où on en est maintenant, répondit Abdennacer depuis son bureau à Hassi Messaoud, lors de leur vidéoconférence habituelle.


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Chapitre 9. Le coup de génie de Djamil

Quelques semaines plus tard – ENSP, Hassi Messaoud

Alors que Abdelkader et Abdennacer pensaient avoir atteint un sommet avec leur projet, Djamil, l’ingénieur mud logger, entra dans leur bureau avec une proposition inattendue.

— J’ai une idée pour pousser ce projet encore plus loin, dit-il d’un ton déterminé.

— Vas-y, on t’écoute, répondit Abdennacer, intrigué.

Djamil posa un dossier sur la table.

— Je travaille depuis un moment sur une application d’intelligence artificielle pour l’optimisation des opérations de forage. Si on utilise des algorithmes d’apprentissage machine, on pourrait prédire encore plus précisément les moments où la pression va devenir dangereuse. On pourrait même optimiser les ajustements des buses en temps réel en fonction des données qu’on reçoit en temps réel du puits.

Abdelkader regarda Djamil avec admiration.

— C’est brillant. L’IA pourrait rendre l’outil encore plus autonome et précis.

— Exactement, répondit Djamil. Je pense qu’on peut commencer par modéliser les données des trois puits qu’on vient de forer afin d’entrainer le modèle. Ensuite, on pourra pousser l’entraînement plus loin afin d’anticiper les blowouts et à ajuster les paramètres de forage en conséquence.

Abdennacer, impressionné par cette nouvelle perspective, se redressa.

— C’est la prochaine étape. On va révolutionner le forage.


Chapitre 10. Le forage pétrolier à l’ère de l’IA

Quelques mois plus tard – Laboratoire de Djamil, ENSP

L’intégration des algorithmes d’intelligence artificielle dans les outils de forage marqua une nouvelle ère pour l’équipe. Grâce aux modèles de Djamil, les outils modifiés étaient capables d’ajuster leur comportement en fonction des conditions de forage en temps réel. Les algorithmes prédisaient non seulement les blowouts, mais optimisaient aussi les performances de l’outil pour augmenter encore le ROP en réduisant les risques liés.

Abdelkader, observant les résultats des nouvelles simulations, se tourna vers Abdennacer.

— On a réussi. On vient de redéfinir ce que signifie innover dans l’industrie du forage.

Abdennacer, souriant, acquiesça.

— Absolument. L’avenir s’annonce prometteur.

Les résultats des simulations avec l’IA furent publiés dans plusieurs revues scientifiques de renommée, attirant l’attention de la communauté internationale. Abdelkader, Abdennacer et Djamil reçurent des invitations à présenter leurs résultats lors de conférences et de séminaires.

— On a été invités à présenter nos résultats à la conférence internationale sur l’innovation en ingénierie pétrolière, annonça Abdelkader au téléphone avec Abdennacer.

— C’est une opportunité incroyable. On va pouvoir partager notre travail avec le monde entier, répondit Abdennacer, enthousiaste.

Lors de la conférence, leur présentation fut accueillie avec enthousiasme, et plusieurs entreprises exprimèrent leur intérêt pour adopter leurs innovations.


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Epilogue

Les mémoires de ce projet restent gravées non seulement dans les rapports techniques et les bilans économiques, mais surtout dans le cœur de ceux qui y ont participé. Toute l’équipe, soudée par l’amitié et la passion de relever des défis quasi-impossibles, contemple désormais un avenir où l’ingénierie inverse et l’intelligence collective redéfinissent la manière de forer les puits.

Leurs succès, symbolisés par des outils renouvelés et des puits plus performants, racontent l’histoire d’un groupe d’hommes et de femmes qui, en osant conjuguer la rigueur technique et passion humaine, ont transformé les obstacles en opportunités. Ce projet, né au cœur d’un désert impitoyable, s’est mué en une aventure humaine et professionnelle qui inspire aujourd’hui de nouvelles générations d’ingénieurs en quête d’innovation responsable.

Alors que les défis du secteur continuent d’évoluer, l’expérience vécue sur le terrain et la force des liens tissés entre collègues réaffirment que le succès ne réside pas uniquement dans la maîtrise des technologies, mais dans la capacité à fédérer les esprits pour un objectif commun. Dans ce souffle d’espérance, l’équipe se prépare à écrire d’autres chapitres, convaincue que la fusion des savoirs techniques et de l’âme humaine ouvrira les portes d’un futur où chaque innovation sera le fruit d’un engagement partagé et d’une vision collective.


Principaux personnages

Mohsin : Technicien Machines à Commande Numérique (CNC) chez ENSP.

Abdennacer : (ex-)Directeur Fabrication & Travaux chez ENSP (actuellement à la retraite).

Abdelkader : (ex-)Directeur des Opérations de Surveillance Géologique des Forages chez Sonatrach (actuellement loin des chantiers de forage, très près des Universités).

Luc : Professeur des Universités / Expert international en innovation frugale, propriété intellectuelle et brevets (toujours en activité dans un des pays des BRICS).

Djamil : Data analyste chez ENSP (prépare actuellement une thèse sur l’apport de l’IA prédictive dans l’optimisation et la sécurité des opérations de forage pétrolier).

Farid : Chef de chantier forage chez Sonatrach.

Amel : Géologue de chantier chez Sonatrach.

Omar : Data engineer dans l’équipe de mud logging de Sonatrach.

Djamel : Mud logger chez Sonatrach.

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